N° 1222
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUATORZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 juillet 2013.
PROJET DE LOI
ADOPTÉ PAR LE SÉNAT,
portant application du protocole additionnel à l’accord
entre la France, la Communauté européenne de l’énergie atomique et l’Agence internationale de l’énergie atomique
relatif à l’application de garanties en France,
signé à Vienne le 22 septembre 1998,
TRANSMIS PAR
M. LE PREMIER MINISTRE
à
M. LE PRÉSIDENT
DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE
(Renvoyé à la commission des affaires étrangères, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
Le Sénat a adopté, en première lecture, le projet de loi dont la teneur suit :
Voir les numéros :
Sénat : 328 (2006-2007), 621, 622 rect. et T.A. 182 (2012-2013).
DÉFINITIONS
Pour l’application de la présente loi :
1° Les mots et expressions : « activités de recherche-développement liées au cycle du combustible nucléaire », « uranium fortement enrichi », « échantillonnage de l’environnement dans un emplacement précis », « matière nucléaire » et « installation » ont le sens qui leur est donné par l’article 17 du protocole additionnel à l’accord entre la France, la Communauté européenne de l’énergie atomique et l’Agence internationale de l’énergie atomique relatif à l’application des garanties en France, signé le 22 septembre 1998 à Vienne et publié au Journal officiel du 29 juin 2004, ci-après dénommé le protocole additionnel ;
2° Les mots : « l’Agence » désignent l’Agence internationale de l’énergie atomique ;
3° L’expression : « État non doté d’armes nucléaires », ci-après dénommé « ENDAN », désigne tout État autre qu’un État doté d’armes nucléaires, au sens de l’article 9 du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires, fait à Washington, Londres et Moscou le 1er juillet 1968 et publié au Journal officiel du 25 septembre 1992 ;
4° Les expressions : « activités en coopération avec un ENDAN » ou « activités de coopération avec une personne établie dans un ENDAN » désignent toute action menée avec ou dans l’intérêt d’un ENDAN ou d’une personne établie dans un ENDAN qui :
a) Soit, pour l’ensemble des activités définies par la présente loi, conduit à un transfert à un ENDAN ou à l’acquisition par un ENDAN de connaissances ou de technologies nucléaires ;
b) Soit, dans le cas des activités de développement du cycle du combustible nucléaire, mentionnées au II de l’article 2, est de nature à modifier les caractéristiques du cycle du combustible ou à en changer la capacité de production ;
c) Soit, s’agissant des activités mentionnées à l’article 4, conduit à une production résultant des activités de fabrication énumérées à l’annexe I du protocole additionnel ;
5° (nouveau) L’expression : « Autorité administrative » désigne l’autorité chargée du suivi de la mise en œuvre par la France du protocole additionnel ;
6° (nouveau) L’expression : « Personne » désigne toute personne publique ou privée, physique ou morale, soumise aux obligations prévues par la présente loi.
OBLIGATIONS DÉCLARATIVES
I. – Toute Personne qui mène, en coopération avec un ENDAN ou une personne établie dans un ENDAN, des activités de recherche-développement liées au cycle du combustible nucléaire, mettant en jeu ou non des matières nucléaires, fournit chaque année à l’Autorité administrative une déclaration comportant les renseignements suivants :
1° Pour les activités qui sont financées, soumises à approbation ou contrôlées par l’État, ou qui sont exécutées pour son compte : une description générale de ces activités, quel que soit le lieu où elles sont menées, ainsi que des renseignements indiquant leur emplacement ;
2° Pour les activités qui ne sont pas financées, soumises à approbation ni contrôlées par l’État ni exécutées pour son compte : une description générale des activités menées en France qui se rapportent directement à l’enrichissement, au retraitement de combustible nucléaire ou au traitement de déchets de moyenne activité ou de haute activité contenant du plutonium, de l’uranium fortement enrichi ou de l’uranium 233, ainsi que des renseignements indiquant l’emplacement de ces activités.
Pour l’application du 2° du présent I, le traitement de déchets de moyenne activité ou de haute activité n’englobe pas le réemballage des déchets ou leur conditionnement, sans séparation d’éléments, en vue de leur entreposage ou de leur stockage définitif.
II. – Toute Personne qui mène ou envisage de mener des activités de coopération, avec un ENDAN ou une personne établie dans un ENDAN, se rapportant au développement du cycle du combustible nucléaire et soumises à approbation de l’État, y compris des activités de recherche-développement liées au cycle du combustible nucléaire, fournit chaque année à l’Autorité administrative une déclaration comportant une description générale de ces activités prévues pour les dix années à venir.
Toute Personne qui mène, dans les installations ou parties d’installations désignées comme devant faire l’objet d’inspections périodiques de l’Agence, conformément au paragraphe a de l’article 78 de l’accord entre la France, la Communauté européenne de l’énergie atomique et l’Agence internationale de l’énergie atomique relatif à l’application des garanties en France, signé à Vienne le 27 juillet 1978 et publié au Journal officiel du 30 septembre 1981, ci-après dénommé l’accord de garanties, des activités d’exploitation consistant notamment en des opérations de manutention, de transformation, de conditionnement, d’entreposage ou de stockage de matières nucléaires, communique à l’Autorité administrative, à la demande de cette dernière, les renseignements prévus à l’alinéa ii du paragraphe a de l’article 2 du protocole additionnel.
Toute Personne qui mène des activités spécifiées à l’annexe I du protocole additionnel en coopération avec une personne établie dans un ENDAN déclare chaque année à l’Autorité administrative la production liée à cette coopération, pour chacun des lieux où sont menées ces activités.
Toute Personne qui exporte ou importe, vers ou depuis un ENDAN, des déchets de moyenne activité ou des déchets de haute activité contenant du plutonium, de l’uranium fortement enrichi ou de l’uranium 233, pour lesquels les garanties ont été levées en application de l’article 11 de l’accord de garanties, communique, au titre de chaque année, à l’Autorité administrative des renseignements relatifs à ces exportations ou importations, comportant notamment les données d’identification desdits déchets, leur quantité, leur provenance ou leur destination et la date ou, le cas échéant, la date prévue de leur expédition.
Toute Personne qui exporte à partir du territoire français vers un ENDAN des équipements fabriqués dans le cadre des activités visées à l’annexe I du protocole additionnel, ainsi que des équipements et matières non nucléaires qui sont mentionnés dans la liste figurant à l’annexe II du protocole additionnel, communique, au titre de chaque trimestre, à l’Autorité administrative des renseignements pour chaque exportation, comportant les données d’identification, la quantité, le lieu où il est prévu de les utiliser dans l’État destinataire et la date ou, le cas échéant, la date prévue de l’expédition.
À la demande de l’Autorité administrative, toute Personne qui importe en France en provenance d’un ENDAN des équipements et matières mentionnés au premier alinéa du présent article communique à l’Autorité administrative des renseignements sur ses importations, permettant à l’Agence de contrôler les renseignements déclarés par l’ENDAN relatifs à ses exportations vers la France.
Les renseignements figurant dans les déclarations mentionnées aux articles 2 à 6 sont destinés à être communiqués par l’Autorité administrative à l’Agence.
L’Autorité administrative peut exiger des Personnes soumises aux obligations déclaratives instituées par les articles 2 à 6 les précisions ou explications sur les renseignements qui sont nécessaires à la mise en œuvre du protocole additionnel.
VÉRIFICATION INTERNATIONALE
Domaine de la vérification internationale
L’Agence peut mener, dans les lieux mentionnés dans les déclarations transmises en application du I de l’article 2, de l’article 4 et du second alinéa de l’article 6, une vérification ayant pour but soit de s’assurer de l’exactitude et de l’exhaustivité des renseignements communiqués, soit de résoudre une contradiction relative à ces renseignements.
Au cours de la vérification, les inspecteurs de l’Agence sont autorisés à :
1° Procéder à des observations visuelles ;
2° Prélever des échantillons de l’environnement ;
3° Utiliser des appareils de détection et de mesure des rayonnements ;
4° Examiner les pièces relatives à la production et aux expéditions, utiles au contrôle de l’application des garanties dans un ENDAN ;
5° Recourir à d’autres mesures arrêtées, dans les conditions prévues au a de l’article 6 du protocole additionnel, par l’Autorité administrative et publiées au Journal officiel.
L’Autorité administrative peut également autoriser les inspecteurs de l’Agence à prendre des photographies et des vidéos.
Dans le but d’accroître sa capacité à détecter des activités nucléaires clandestines dans un ENDAN, l’Agence peut procéder à une vérification en tout lieu, autre que ceux visés à l’article 8, dont le périmètre est proposé par l’Agence et accepté par l’Autorité administrative. Les activités menées par l’Agence dans ce lieu sont limitées à la prise d’échantillons dans l’environnement et au recours à d’autres mesures arrêtées, dans les conditions prévues au b de l’article 6 du protocole additionnel, par l’Autorité administrative et publiées au Journal officiel.
Exécution de la vérification internationale
Modalités d’accès aux locaux et installations
La vérification internationale est faite par des inspecteurs de l’Agence, habilités par celle-ci et agréés par l’Autorité administrative.
L’Autorité administrative désigne une équipe d’accompagnement aux fins de veiller à l’exécution de la vérification internationale dans les conditions prévues par la présente loi.
Le chef de l’équipe d’accompagnement représente l’État auprès des inspecteurs de l’Agence et de la Personne soumise à la vérification internationale.
La vérification internationale, dans les cas définis aux articles 8 et 9, ne peut intervenir qu’après un préavis d’au moins vingt-quatre heures notifié par l’Agence à l’Autorité administrative. L’accès aux lieux non ouverts au public est possible de 8 h à 20 h et à tout moment lorsque l’activité professionnelle est en cours.
Avant le début des opérations, le chef de l’équipe d’accompagnement remet à la Personne un avis de vérification internationale. Cet avis précise l’objet des vérifications envisagées.
Les opérations de vérification sont exécutées en présence de la Personne ou de son représentant dans les conditions prévues aux articles 10 à 18. Dans l’attente des résultats définitifs, les résultats immédiatement disponibles et les opérations effectuées sont consignés dans un procès-verbal selon des modalités définies par le décret en Conseil d’État prévu à l’article 26.
Les procès-verbaux établis en application du présent article ne sont pas opposables aux Personnes lorsqu’elles font l’objet de poursuites pénales.
En cas d’opposition partielle ou totale à une vérification internationale prévue au présent titre ou à une inspection internationale prévue par le traité instituant la Communauté européenne de l’énergie atomique ou par l’accord entre la France, la Communauté européenne de l’énergie atomique et l’Agence internationale de l’énergie atomique relatif à l’application de garanties en France, signé à Vienne le 27 juillet 1978, l’Autorité administrative peut solliciter du président du tribunal de grande instance l’autorisation de faire procéder à cette vérification ou cette inspection.
Le tribunal de grande instance compétent est celui dans le ressort duquel sont situés les lieux ou les locaux concernés.
Le président du tribunal de grande instance statue par une ordonnance sur requête, conformément aux articles 493 à 498 du code de procédure civile.
Limitations d’accès et modalités de contrôle
Les droits de l’Agence de mener une vérification internationale ne font pas obstacle à ce que l’accès des inspecteurs de l’Agence aux zones, locaux, documents, prélèvements ou données, concernés en application des articles 8 et 9, soit limité, à l’occasion d’une vérification, en vue :
1° De la protection des informations sensibles du point de vue de la prolifération des armes nucléaires et des intérêts de la défense nationale ;
2° Du respect des prescriptions de sûreté ou de protection physique ;
3° De la protection des informations exclusives ou sensibles du point de vue industriel ou commercial ;
4° De la protection des informations relevant de la vie privée des personnes.
Le chef de l’équipe d’accompagnement, en liaison avec la Personne soumise à la vérification internationale, veille au respect des dispositions convenues à cet effet entre l’Autorité administrative et l’Agence.
Au cours de la vérification internationale, les inspecteurs de l’Agence, les accompagnateurs et, le cas échéant, les autres personnes désignées par le juge en application de l’article 12 se conforment aux prescriptions de sécurité, de sûreté nucléaire et de radioprotection en vigueur dans les lieux auxquels il leur est donné accès.
Confidentialité
Les membres de l’équipe d’accompagnement et, le cas échéant, les autres personnes désignées par le juge en application de l’article 12 sont tenus de garder secrète toute information dont ils sont dépositaires soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, soit en raison de l’application de la présente loi.
Le chef de l’équipe d’accompagnement, s’il a connaissance d’informations sensibles telles que mentionnées à l’article 13, prend, en liaison avec la Personne, toutes dispositions pour empêcher leur diffusion et assurer leur protection.
Le chef de l’équipe d’accompagnement s’assure qu’aucun document, prélèvement, donnée, ou autre type d’information sans rapport avec les raisons de la demande d’accès n’est rendu accessible aux inspecteurs de l’Agence. Il veille à ce qu’aucune information nominative relative à la vie privée des personnes ne soit communiquée aux inspecteurs de l’Agence.
Sous réserve que les dispositifs de transmission protègent la confidentialité des informations, les inspecteurs de l’Agence peuvent librement communiquer avec le siège et les bureaux régionaux de l’Agence ou transmettre à ceux-ci, automatiquement ou non, des informations fournies par les dispositifs de confinement et de surveillance ou de mesure tels que ceux mis en place dans les installations ou parties d’installations désignées, conformément au paragraphe a de l’article 78 de l’accord de garanties, comme devant faire l’objet d’inspections périodiques de l’Agence.
DISPOSITIONS PÉNALES
Sanctions pénales
Le fait de ne pas transmettre à l’Autorité administrative les renseignements et informations mentionnés aux articles 2 à 6 est puni de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 75 000 €.
Le fait de faire obstacle à l’accomplissement de la vérification internationale ou de l’inspection internationale autorisée par le président du tribunal de grande instance dans les conditions prévues à l’article 12 est puni de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 200 000 €.
Outre les officiers et agents de police judiciaire agissant conformément aux dispositions du code de procédure pénale, les agents des douanes peuvent rechercher et constater les infractions aux prescriptions de la présente loi ainsi qu’aux dispositions réglementaires prises pour son application. Les agents des douanes agissent à l’occasion des contrôles qu’ils effectuent en application du code des douanes et disposent des pouvoirs d’investigation qui leur sont conférés par ce code.
À l’occasion de la recherche de ces infractions, les officiers et agents de police judiciaire et les agents des douanes peuvent se faire présenter les pièces justificatives des déclarations prévues aux articles 2 à 6.
Sans préjudice des dispositions pénales dont l’application serait justifiée par la nature des informations en cause, le fait, pour une personne mentionnée à l’article 15, de révéler une information protégée au titre de la présente loi est puni des peines prévues par l’article 226-13 du code pénal.
Responsabilité pénale des personnes morales
Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues à l’article 121-2 du code pénal, des infractions prévues aux articles 19, 20 et 22.
Les peines encourues pour les personnes morales sont :
1° L’amende, suivant les modalités prévues à l’article 131-38 du code pénal ;
2° Les peines prévues aux 2° et 9° de l’article 131-39 du même code. L’interdiction mentionnée audit 2° porte sur l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise.
DISPOSITIONS RELATIVES À L’OUTRE-MER ET DISPOSITIONS DIVERSES
Dispositions générales relatives à l’outre-mer
Sous réserve des dispositions de l’article 25, la présente loi est applicable dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.
Pour l’application de la présente loi à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon, dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie, les mots : « tribunal de grande instance » sont remplacés par les mots : « tribunal de première instance ».
Dispositions diverses
Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application de la présente loi.
Délibéré en séance publique, à Paris, le 2 juillet 2013.
Le Président,
Signé : Jean-Pierre BEL